Roubaixxl : Quel est le protocole mis en place dans les salles de naissance dans le cadre de la pandémie du Covid-19 ?

Dr Anastasia Chudzinski : Nous avons mis en place différentes mesures pour accueillir au mieux toutes les patientes. Ce sont des règles qui peuvent changer en fonction de la crise sanitaire. Nous nous adaptons constamment.

Aujourd’hui, les futures mamans entrent désormais aux urgences. Aux urgences, un filtrage s’effectue en fonction de la présence de symptômes ou non. Leur température est prise.

Si elles ne présentent aucun symptôme, elles sont conduites en salle de naissance où le port du masque leur est obligatoire. Pour le moment, à la maternité de Beaumont, la présence du papa ou d’un accompagnant n’est pas remise en cause, il peut toujours assister à l’accouchement, y compris s’il s’agit d’un accouchement par césarienne.

En revanche, concernant les suites de couches, si le papa décide de rester, il sera confiné. Cela signifie qu’il devra rester avec maman et bébé durant tout le séjour. Nous devons limiter au maximum les allées et venues. Nous savons que c’est un déchirement pour les mamans qui ont déjà un enfant, puisque le papa ne peut plus venir une fois qu’il est sorti. Mais nous travaillons beaucoup sur les sorties précoces (si tout va bien, les mamans peuvent sortir après 48h, avec un suivi par une sage-femme à la maison, NDLR). Cela permet aux mamans de retrouver plus rapidement leur foyer.

Roubaixxl : Et si une patiente présente des symptômes et est infectée ?

A . C. : Nous avons mis en place au sein de la maternité une unité Covid. Un parcours spécifique et différent des autres patientes permet de les prendre en charge sans qu’elle puisse être en contact avec les autres mamans. A l’issue de ce parcours, si c’est nécessaire elle sera hospitalisée, sinon, elle pourra rentrer chez elle. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas, mais nous sommes prêts à accueillir une maman qui présenterait des symptômes particulièrement graves.

Roubaixxl : Et concernant le suivi de grossesse classique ?

A.C. : Toutes les consultations sont maintenues, nous les avons adaptées. Si la grossesse suit son court normalement, nous avons mis en place les consultations au téléphone ou en visio-conférence. Le but est de faire se déplacer le moins possible les patientes. Les ordonnances sont directement faxées aux pharmacies ou aux laboratoires.

Pour les échographies, les mamans ne peuvent pas venir accompagnées. Elles passent aussi par les urgences pour filtrage avant d’être orientées. Les consultants ont mis en place des visio-conférences aux moments clefs de l’échographie pour permettre au papa de profiter un peu du moment : voir le visage du bébé, écouter son cœur…

Les consultations gynécologiques classiques ont été reportées, ce qui permet de dégager du temps pour désinfecter les salles après le passage de chaque patiente, et surtout pour leur éviter d’attendre à plusieurs leur rendez-vous dans la salle d’attente.

Roubaixxl : Les femmes enceintes sont-elles particulièrement exposées au Covid-19 ?

A.C. : C’est sûr que les défenses immunitaires des femmes enceintes sont en baisse. Nous n’avons pas assez de recul sur les effets du COVID sur une femme enceinte, mais il est aujourd’hui certain que le virus ne passe pas la barrière du placenta, le bébé ne risque donc rien. Mais sa maman est donc plus fragile et donc plus que jamais, elle doit absolument rester dans son cocon.

Récit d’un accouchement pas tout à fait comme les autres…

Axelle Demey a donné naissance à sa fille Maëlhya le 29 mars à la maternité de Beaumont. Une maternité qui s’est mise en ordre de marche pour prendre soin des mamans dans le contexte de pandémie de Covid-19.

« J’ai eu des contractions toute la journée du dimanche 29 mars. A 20h, cela devenait trop difficile, j’ai fait appel à une ambulance », se rappelle Axelle Demey, jeune maman. Ses deux garçons, Raphaël (3 ans) et Maël (1 an) restent à la maison avec leur tante. « A mon arrivée aux urgences, une infirmière a pris ma température et m’a demandé si j’avais des symptômes du virus. » Axelle va bien, à part une petite toux qui traîne. « On m’a demandé de porter un masque tout au long de l’accouchement. Ce n’était pas forcément évident de respirer avec, surtout au moment clef… » Sa fille est née à 22h32. Axelle retire son masque : « Je n’ai pas pu m’en empêcher ! J’étais tellement heureuse ! » Et comme toute nouvelle maman, la jeune femme de 25 ans voulais couvrir de bisous son nouveau-né.

« Le papa a pu assister à l’accouchement et il est resté toute la nuit. »

« Mon conjoint ne pouvait pas revenir »

Mais comme Maëlhya est la petite sœur de deux garçons, Brandon, le papa, a dû repartir. « Et il ne pouvait pas revenir. » Et c’est bien là le véritable changement qu’elle a pu constater : « Je dois avouer que j’ai trouvé le temps long, confie Axelle. Je pensais qu’avec le virus, le personnel aurait moins de temps à nous consacrer. Mais pas du tout. L’équipe soignante a été très bienveillante, raconte la jeune maman. Le personnel passait régulièrement pour prendre de mes nouvelles, vérifier que l’allaitement se déroulait bien, m’aider… »

Finalement, Axelle a pu rejoindre son foyer le 1^er avril. « Ça a été de très belles retrouvailles, vraiment un beau moment ! »