[Portrait] Vianney : street-artist de la situation
Publié le 28 mai 2025|

Il est une figure de l’école de « Roubaix Graffiti » et promène son blase dans toute la ville et au-delà. Vianney Daltes a grandi à Roubaix et en connaît tous les recoins. Il est graffeur depuis qu’il est petit.
Bio Express
- 2005 : Après des années de pratique avec mon crew, on transmet notre art aux plus jeunes lors d’initiations. Certains pratiquent encore 20 ans après et en vivent !
- Mai 2018 : Je me lance en tant que professionnel.
- 2019 : Voyage à Miami avec Mikostic et JonOne pour rencontrer tous les fondateurs de la mouvance graffiti et réaliser une oeuvre dans l’un des plus emblématiques musée sur le streetart.
- 2019 : J’ai récupéré Benoît Poelvoorde en auto-stop près du Kinepolis.
- Juin 2021 : Collaboration avec la marque roubaisienne Jules. 30 000 tote-bags vendus dans cinq pays d’Europe et le Maroc. Réalisation d’un mur dans leur siège social.
On le rencontre un après-midi gris de la fin avril. Rendez-vous pris devant « son » mur, rue du Chemin de fer. Casquette vissée sur la tête, il se cache derrière la visière et n’est pas très à l’aise. On le fait rire, Vianney se déride et nous parle à coeur ouvert de Roubaix, son « terrain de jeu » préféré.
Il a commencé par vouloir imiter son frère Xavier, de quatre ans son aîné, jeune graffeur à l’époque. Évidemment son frère voulait l’en dissuader, et Vianney en avait encore plus envie, rapport de force classique entre deux frères. Il n’était pas très scolaire, ne décroche pas le bac et obtient un BEP en vente. Véritable autodidacte, Vianney a fait 1 000 métiers : livreur à la Poste, animateur au centre social des Trois-Ponts, la plonge à OVH… Et tout ça, à Roubaix. « Je suis un pur produit roubaisien » aime-t-il à dire. Il s’est fait tout seul et a forgé son style au fur et à mesure de ses sorties. Fan du rouleau, Vianney est reconnu dans son style, le « bloc letter ». Le « timide de base » s’est affirmé grâce à son art et reconnaît aujourd’hui le privilège d’avoir un métier passion.
Roubaix l’inspire : son architecture, ses friches, les cheminées, une atmosphère. « Petit je visitais des usines et je faisais de l’urbex sans le savoir, avant même que cela devienne une pratique culturelle.»
L’argent s’est immiscé dans la partie, une chance pour certains d’en vivre. Comme Vianney qui enchaîne les gros projets de commandes, mais continue de s’amuser et de faire des sorties « en vandale ». Mais avec une vraie éthique de graffeur : « On a toujours la volonté d’améliorer, jamais pour dégrader et jamais non plus sur un bien privé. » explique le jeune homme de 39 ans, aux allures d’adolescent.
Un graff est toujours réalisé avec la volonté d’améliorer, jamais pour dégrader et jamais non plus sur un bien privé.
Ses faits d’armes commencent à prendre de la place sur son CV. Modeste, il nous égrène ses réalisations au compte-goutte. Ce mur voisin des Trois Tricoteurs a fait des émules. L’entreprise Jules l’a sollicité pour en créer un à l’effigie de la marque sur le même modèle. Il a officié sur un mur de l’Usine en juin 2024. Sa dernière œuvre, monumentale, recouvre les 4 façades d’un hôtel à Seclin sur une surface de 800 m². Pour ce travail, Vianney n’a pas officié seul mais avec son acolyte Charles aka Salgos. Vingt ans d’amitié les unissent, ils ont fait leurs premiers pas de graffeurs ensemble. Quand Charles parle de son ami Vianney, il est pudique mais il nous dit les « good vibes » qu’il dégage. « Je dis toujours qu’il est l’homme de la situation ». Pas besoin d’en rajouter, cela veut tout dire…
Leur prochaine collaboration, ils la signeront à l’occasion du prochain URBX, le festival des cultures urbaines made in Roubaix. Cinq jours de travail sur un mur du parking de l’Usine dès le 23 juin, avec un seul mot d’ordre : « carte blanche ». Quelle est donc leur inspiration ? « Cela fait des années qu’on se fait des fresques dans nos têtes, donc là on va s’éclater ! » précise Salgos. Nous n’en saurons pas plus, juste cet indice : « On va réunir nos deux univers : les grosses lettres de Vianney et la végétation et les animaux pour moi » explique-t-il. La date est bien choisie car au-delà d’URBX, elle correspond pile-poil au début des soldes d’été.

Quand Vianney ne graffe pas, il parcourt la ville à vélo, un mode de déplacement doux qui lui convient bien pour repérer ses prochains spots. Il écume aussi les concerts dans les salles de la métropole lilloise. « J’écoute de tout, du rappeur français Souffrance à Julien Doré ! ».
Vianney jette un œil aux clichés que l’on a réalisés avant l’interview. Légèrement gêné, il lâche un « je vous fais confiance pour le choix, chacun son métier. » Son métier passion, il l’exerce avec toujours autant d’enthousiasme et d’émerveillement, conscient d’avoir le privilège de travailler en s’amusant, à moins que ce ne soit l’inverse…
Vianney Daltes : son portrait en vidéo
Ses coups de cœur
- Koï Sushis : J’y vais régulièrement, pour déjeuner ou l’après-midi pour boire un verre.
- Le Musée La Piscine : Ce musée est source d’apaisement, de ressourcement. J’y amène tous les amis qui me rendent visite.
- L’usine Terken : Une friche abandonnée forcément c’est un lieu de rendez-vous pour les graffeurs et photographes.