Son sourire éclatant révèle ses dents du bonheur. Son sourire est un bonheur. Un soleil. « Tarcice voit toujours le verre à moitié plein, elle est pugnace, volontaire, courageuse à l’extrême. » Celle qui décrit ainsi Tarcice Esson dans un élan spontané et sincère la connaît bien. Isabelle Hottin a croisé le chemin de Tarcice en 2020, grâce à l’association Chœur de Femmes. Et c’est à l’unisson, durant 18 mois (« le temps de deux grossesses », plaisantent-elles), qu’elles ont donné naissance à un bébé de 224 pages, un livre, celui d’une vie.

De Douala à Paris, de la douleur à l’espoir

Quand Tarcice naît en 1977 au Cameroun, elle est la petite dernière d’une fratrie de douze enfants. La benjamine est vive et adorée de sa maman. Quand à deux ans la maladie la frappe, la foudre s’abat sur toute la famille. La poliomyélite n’est pas rare dans ce pays d’Afrique où les campagnes de vaccination contre sa propagation ne sont pas encore d’actualité. Tarcice, plus choyée que jamais, se forge un caractère bien trempé. Elle voit les autres enfants gambader, ne comprenant pas pourquoi elle ne peut pas se joindre à eux. Adulte, face aux difficultés d’accès aux soins au Cameroun, elle décide de rejoindre la France, là où, rêve-t-elle, ses jambes iront un peu mieux. En tout cas, elle veut y croire. Tarcice est comme ça. Même assise, dans son fauteuil, elle est debout et ne se résigne pas.

Mise à l’eau et révélation

En 2003, Tarcice décolle de Douala direction Roissy. Une amie de sa sœur l’attend et l’accueille chez elle dans le Nord. Elle entame un long parcours de soins à l’hôpital Swynghedauw, qui, au sein du CHU de Lille, propose des activités de rééducation et convalescence neurologiques. Un jour, une séance dans un bassin aquatique est programmée. Tarcice a le trac. « Je n’étais jamais allée dans l’eau, j’étais anxieuse. » Immergée, affolée, elle s’agrippe autant qu’elle le peut au soignant. On lui découvre une force incroyable. « Vous avez des bras en or, vous devez faire du sport ! »

Un tempérament de championne

Au sein de l’Athlétique Club de Villeneuve d’Ascq, section handisport, Tarcice déploie ses ailes. Elle ne roule pas en fauteuil, elle court. Et, à force d’entraînements, remporte vite ses premiers trophées. Victoire ! Tarcice la lionne démontre au monde entier que l’on peut tomber, se relever et gagner. Aujourd’hui, l’athlète a engrangé une vingtaine de médailles et de coupes. Son regret ? Que sa maman n’ait pu assister à sa consécration en tant que sportive. « Elle qui s’est toujours inquiétée pour moi… de là-haut, je sais qu’elle est fière de moi. » Celles qui le sont aussi, ce sont ses filles, Eunice, 12 ans et Ajoppée, 11 ans. « Nous avons des prénoms rares, car nous sommes des personnes rares », sourit Tarcice, les yeux pétillants de malice.

[Photo : Sébastien Candelier – Ville de Roubaix]

Dans les coulisses du shooting 😉