Julie Antoine, la vie de rêve au Couvent
Publié le 26 mai 2021|
Le couvent de la Visitation, situé dans le quartier de l’Hommelet, attendait une nouvelle vie depuis plus de 10 ans. Il va renaître en 2022 avec le projet hybride de l’équipe du Better, mêlant restauration, pratiques artistiques, rencontres associatives et boutiques. Rencontre avec Julie Antoine, la directrice artistique qui incarnera l’âme du lieu et le visage du « Couvent ».
Quand Julie vous ouvre les portes du bâtiment, il faut un peu d’imagination pour se projeter dans ce qui sera sans nul doute l’un des futurs lieux de convivialité du quartier de l’Hommelet. Les galeries du cloitre sont encore « dans leur jus », les vitres intérieures cassées, les murs délabrés et le jardin intérieur livré aux herbes folles. Le jour de notre visite, il pleut à torrent et de l’aveu même de notre hôte, les lieux sont un peu « glauques »…
Pourtant, après quelques minutes en sa compagnie, vous êtes chez elle comme chez vous : le tutoiement est immédiat et c’est comme si vous sirotiez déjà avec elle un verre, attablés sur la grande terrasse, en jetant un œil sur les enfants qui jouent dans le jardin central. Les jeunes du quartier croisent les mamies, les plasticiens côtoient les musiciens et les chineurs se régalent de la cuisine faite maison : c’est le Couvent rêvé de Julie Antoine.
« Roubaix, ma ville idéale »
Si les Marseillais exagèrent souvent lorsqu’ils racontent une histoire, on a très envie de croire à celle de cette native de la cité phocéenne. Son parcours : le sud de la France, Bruxelles, Genève, Verviers… Julie se joue des frontières, de toutes les frontières : géographiques et sociales, économiques et culturelles. La voici posée à Roubaix : « ma ville idéale, mélange de Berlin, Liège, et Marseille ».
Issue d’une famille ouvrière, d’origine gitane, enfant turbulent, elle a connu les « années galères » mais remercie ses parents de lui avoir permis de vivre très tôt ce qu’elle appelle « la Grande Vie », en accédant aux arts , à la culture, au sport…
Maman célibataire très jeune (« J’ai aujourd’hui 4 enfants, j’en suis fière, dites le bien dans votre article ! »), cette ancienne boxeuse, ayant flirté parfois à l’adolescence avec la délinquance, a gagné son surnom de « Dame Castagne » : « je me suis beaucoup calmée… si je me bats aujourd’hui, c’est pour mes projets. »
Après ses années d’études, attirée par le monde du spectacle, elle s’essaie au théâtre (« mais je n’aimais pas faire l’actrice et minauder. Et pour moi le milieu du théâtre était bien trop classique…». Elle se tourne alors vers la mise en scène et le cinéma, «parce que sur un tournage c’est carré, hiérarchisé, et j’aime ça !». Elle s’amuse de notre étonnement… « Surprenant ? Mon moteur c’est le travail d’équipe. J’aime la solidarité entre personnalités et métiers différents… on se retrousse les manches pour atteindre le même résultat, tous ensemble.»
Le partage, le goût des autres, la volonté de transmettre, l’amènent vers la restauration et l’aventure du Better, à Villeneuve-d’Ascq (fermé en 2020) puis vers le projet du Couvent, porté en famille avec son frère, son mari, sa belle-sœur, ses enfants… et une nouvelle équipe de jeunes créateurs : «J’aspire désormais avant tout à découvrir des talents, à les faire émerger, pour les amener à me succéder un jour.»
« A Roubaix, il y a beaucoup à faire et à rêver »
Ce qui l’intéresse à Roubaix : mélanger les populations, créer des passerelles. Les Roubaisiens, aux origines multiples mais partageant la même fierté roubaisienne, elle veut les réunir, leur ouvrir ses portes, les sortir d’un certain entre-soi : « Je souhaite ici instaurer des cours permanents. Au-delà de la danse et du yoga, j’imagine un travail sur l’estime de soi, sur la parentalité pour les femmes isolées, des ateliers pour apprendre à bien manger, de l’intergénérationnel, une boutique éco-responsable…»
Un discours presque politique ? « J’assume ! J’ai des convictions, je ne me travestis pas … Tant pis si ça déplait… Je suis franche et entière, ce qui m’a amené beaucoup d’ennuis, mais aussi beaucoup de réussites». La réussite du projet justement, comment la mesurera-t-elle ? « Je pense comme une artiste pas comme une commerciale. La ville de Roubaix et Vilogia (bailleur social propriétaire des lieux) nous soutiennent. Ils sont courageux. De mon côté je m’investirai à 200% pour le projet. Je serai quotidiennement présente ici. Vous me croiserez d’ailleurs souvent en salopette de mécanicienne ! »
« J’aime les bizarres, les tordus, les écorchés… »
En quittant les lieux, au cours de notre conversation, on découvre qu’elle a créé un studio créatif baptisé « VULGARITE NOBLE ». L’occasion de l’interroger sur ce qu’elle considère comme noble : « l’intégrité ». Et vulgaire ? Sans hésitation : « MOI ! Mais vulgaire vient du latin « vulgus », qui signifie «peuple»… ceci dit je suis aussi très grossière… et j’aime les bizarres, les tordus, les écorchés… ».
On laisse Julie sur le parvis de l’église du Sacré-Coeur : « Je dois récupérer des colis chez les Sœurs de la Visitation, elles habitent en face… je les adore ! Vous connaissez leur Ordre ? Elles sont entièrement dévouées aux pauvres et aux malades. Au sein de l’Eglise, ce sont des rebelles, indépendantes…». Julie Antoine qui prend la relève de ces sœurs au Couvent : heureux hasard ?
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— Ville de Roubaix (@roubaix) March 14, 2021
Vilogia mise sur l’occupation transitoire en accueillant sur site Le Couvent - Roubaix, un lieu de vie atypique pensé autour de la gastronomie, de la culture, du bien-être et du bien vivre ensemble. pic.twitter.com/ekHKzSiHxW
— Vilogia (@VilogiaGroupe) May 6, 2021